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Le Mot du Gérant

Travail, Technique et Liberté

Déposer un ensemble, le désolidariser, l’ouvrir, contrôler l’état général, puis chaque pièce suivant sa propre spécificité, identifier la fonction de chacun et sa rentabilité énergétique, vérifier les voiles, l’usure, la planéité ou la courbure, puis exclure une hypothèse de dysfonctionnement, puis une autre, remonter, et recommencer sur un autre ensemble, une autre cause possible, encore et encore…

Il y a dans le travail du mécanicien, comme chez tout autre scientifique, un processus itératif qui pourrait sembler lassant, répétitif, voire inaccessible à l’entendement des non-initiés.

Beaucoup de personnes m’ont déjà interrogé : « Quel plaisir prends-tu à répéter mécaniquement les mêmes gestes ? »

Dans la pensée courante, la répétition entraine un sentiment d’emprisonnement intellectuel, un sentiment d’absurde. Un enchainement de gestes similaires entraineraient une déconstruction de soi, à la manière des Temps modernes de Chaplin.

Mais le véritable travail du mécanicien ne s’arrête pas à un processus vain de répétition, il ne s’arrête pas à passer une valise de diagnostic, à traduire au client le code défaut affiché et à se proposer de changer une pièce, sans d’autre volonté que de résoudre un problème dont il ne comprend ni la cause, ni la finalité.

Le mécanicien croyant n’est pas un « changeur de pièce ». Il va plus loin que ce que ses outils lui dictent. Sinon, quel sens donnerions nous à notre travail ? Malheureux l’homme qui se lève chaque matin sans connaître la raison pour laquelle il va œuvrer.

Loin de l’industrialisation de masse, il y a dans l’artisanat – car la mécanique relève de l’artisanat – une appréciation inégalée de voir ses mains façonner, construire,  altérer afin de rendre meilleur, plus bon ou plus beau. Là est bien la finalité de notre travail. Et ce travail doit et devrait toujours tendre vers une résolution logique et concrète.

Ainsi, les sciences ne sont pas une fin en soi. « L’intelligence devrait se servir de la technique et non la servir » écrivait Edgar Morin. La technique n’a pas vocation à se suffire, mais à aboutir à quelque chose de plus grand, de plus absolu. Et cet Absolu se voit dans la satisfaction qui illumine le visage d’un client lorsqu’il entend son moteur rugir. Cet absolu se lit dans l’excitation qui le gagne au moment de s’assoir sur sa machine tant chérie puis de s’élancer, comme un homme nouveau, dans un mouvement unique et hors du temps, lui permettant d’accéder à un sentiment transcendant : la Liberté.


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